Bonjour,

Je suis un peu étonné que SLATE, dont j'apprécie en général le sérieux et la rigueur, publie, dans le corps d'un article sérieux, un tel dessin en laissant croire qu'il est issu d'une vidéo réelle.

Le titre est racoleur.

Le reste de l'article est plus sérieux et objectif même si la critique des fumistes avérés (Raël, et Jeremy Corbell) est légèrement "détachée"

De toute façon la majorité des lecteurs se contentent du titre, de l'image et des premières lignes. C'est là que réside la nocivité de tels articles.

Dommage aussi que l'auteur n'en ai pas profité pour rappeler que le terme "OVNI" est complètement désuet et non adapté : souvent ces manifestations ne sont pas des objets et ne volent pas obligatoirement.

Si l'on veut faire preuve de de rigueur il faut utiliser le terme de PAN (Phénomène aérospatial Non identifié) beaucoup plus précis.

Mais qui se soucie vraiment de rigueur dans ce domaine ? Elle ne fait pas vendre ;-)

Concernant l'article de Slate, je partage le point de vue de @Decebal_UDREA .

Je vais alors plutôt commenter la vidéo de cet article : https://www.nbcnews.com/now/video/new-video-of-unidentified-flying-object-recorded-near-california-released-236881989727

Je note que les PAN observés peuvent avoir des formes variées (tic-tac, triangle), qu’ils ne se comportent pas comme des avions classiques et qu’ils sont souvent repérés au-dessus de la mer.

Il pourrait par exemple s’agir de mirages atmosphériques, comme des fata morgana, où ce que les témoins perçoivent ne serait qu’une sorte de reflet déformé de navires ou d’autres objets situés à l’horizon.

A. Pourquoi l'article ?

On peut trouver des explications au fait qu'on publie l'article.

1. Celui qui raconte l'histoire initiale sort de l'anonymat et peut devenir une célébrité.
2. C'est une jolie histoire et on aimerait y croire.
3. Les médias peuvent espérer susciter l'intérêt, et entre autres choses générer de la publicité.
4. Les pouvoirs peuvent trouver opportun de jeter un écran de fumée pour masquer leurs activités. On notera que la source est X, et que l'administration Trump a mené une campagne pour populariser ces thèmes en affichant avoir déclassifier des informations.

B. Revenons aux faits exposés.

Si on prend du recul, on s'aperçoit qu'il nous manque presque toute l'information nécessaire.

B.1. Pas des scientiques, mais des soldats.

En effet, la source est un porte-avion de la "Navy". Il y a des observateurs qualifiés qui ont des moyens d'observation sophistiqués, mais ils ne sont pas là pour contribuer à la recherche scientifique. Leur rôle est d'être paranoïaque, et de traiter tout ce qui sort de l'ordinaire comme une menace jusqu'à ce qu'ils soient persuadés du contraire. Ils sont sous tension permanente. Ils doivent être prêt à réagir automatiquement, rapidement, et de manière coordonnée au moindre incident. Ils ne doivent toutefois pas tirer de manière préventive pour se défendre, car nous sommes en temps de paix. Si jamais la menace était réelle ils courent donc le risque que l'autre en profite et attaque le premier. C'est une situation de grand stress.

B.2. Les instruments d'observation.

Les instruments d'observation, malgré leur qualité, ne sont pas parfaits. Si on zoome sur l'image on se rend compte qu'elle est parsemée d'artefact en forme de "smarties", mais avec un contraste plus faible. Est-ce qu'il est statistiquement impossible qu'un artefact ait la dimension de l'objet mis en évidence ? Est-ce qu'il est satistiquement impossible que cet artefact ait le comportement décrit ? Pour le savoir il faudrait observer toutes les images, et pas une seule courte séquence. En 20 ans il y a plus de 10 millions de minutes d'observation par instrument. En examinant la totalité des images, et pas juste un peu plus d'une minute d'enregistrement, on pourrait traiter le sujet. Avec le peu que l'on a, on a l'impression que cela peut arriver une fois sur 10 millions sur un instrument d'observation visuel d'un porte-avion.

Pour les observations radars, le problème est le même. Voici une image de l'écran d'observation d'un radar(1). Il y a des très nombreuses taches difficiles à interpréter. Si on arrive à avoir un échange radio avec les aéronefs cela simplifie tout. Les logiciels ajoutent une étiquette à l'avion, et un dessin le symbolisant(2). Pour les autres c'est la sagacité du technicien qui permet d'analyser. La même question que vue plus haut, et concernant les artefacts d'observations, se pose.

Les autres inconvénients sont multiples: un radar va repérer tout ce qui ré-émet ses ondes donc, par exemple, le sol, les nuages, les oiseaux, etc. A titre d’information, une bande autour du radar ré-émise par le sol est inutilisable; ce phénomène s’appelle le ground clutter. Vous aurez compris que lorsque vous cherchez des avions et non pas des reliefs, des oiseaux ou des nuages, il devient parfois difficile de s’y retrouver. Si vous en doutez, essayez de visiter une installation de détection militaire et de comprendre tout ce qui est visualisé sur l’écran ;D.

B. 3. La dynamique de groupe.

Dans l'incident du Nimitz (3) il y a de nombreux témoignages. Ils viennent tous de personnes payées pour être paranoïaques, agir en groupe dès qu'il y a quelque chose de suspect, et prendre toute observation pour un signal à priori positif. Quand une foule craint un attentat ou un incendie, elle va réagir très rapidement et en s'inspirant du comportement des autres. Si des militaires ou des policiers craignent une agression, et qu'il leur semble entrendre un coup de feu, ils peuvent réagir en groupe en tirant ensemble. Si on les interroge après coup il est possible qu'ils affirment avoir vu et entendu le coup de feu, même s'il n'y en n'a pas eu. Pour le Nimitz, tout ceux qui sont intervenus avaient très envie de voir quelque chose, et dans ces condition cela augmente les risques d'erreur.

Il ne s'agit d'ailleurs pas d'erreurs du point de vue militaire, mais uniquement du poins de vue scientifique. Ils ont fait leur travail de soldat en réagissant rapidement, et en évitant les conséquences néfastes. Du point de vue des autorités militaires c'est une bonne occasion d'analyser la manière dont l'équipage face à une menace intattendue. C'est une motivation supplémentaire pour étudier ce type d'incident.

C. Une approche scientifique ?.

Si on voulait traiter scientifiquement la question, il y aurait un travail préalable à réaliser pour en analyser la fréquence et si on ne peut faire le rapprochement avec d'autres phénomènes pouvant aboutir aux même résultats.

(1) https://controle-aerien.chakram.info/un-outil-indispensable-le-radar-primaire/

(2) https://fr.wikipedia.org/wiki/Radar_de_contr%C3%B4le_a%C3%A9rien

(3) https://fr.wikipedia.org/wiki/Incident_du_Nimitz