Depuis la publication de cet article dans La Marseillaise, l'Elysée dément cette phrase d'Emmanuel Macron, tandis que plusieurs membre du Modef, dont Lucie Illy, vice-présidente du Modef, confirment avoir entendu ces propos, bien que le phrasé exact puisse différer. Par la suite, lors d'une conférence de presse, Emmanuel Macron lui-même a réfuté ces allégations mais a tenu à expliquer sa position en réitérant, plus ou moins, les idées qui lui étaient reprochées. Par ailleurs, il avait également tenu des propos similaires au mois de janvier, cette fois-ci concernant le remboursement des médicaments :

Au moment où je vois ce que nos compatriotes peuvent dépenser pour des forfaits téléphoniques, la vie quotidienne, se dire qu’on va passer de 0,50 à 1 euro pour une boîte de médicament, je n’ai pas le sentiment qu’on fait un crime terrible.

Source : Libération

Je respecte bien évidemment le choix démocratique des Français qui l'ont élu Président à deux reprises, mais pour ma part, certains de ses propos, souvent méprisants envers les classes laborieuses, m'ont toujours dérangée, et ce, bien avant sa première élection présidentielle.

Maintenant, je vais aborder le sujet en question. Souvent, j'entends ou je lis des gens dire que les smicards, les ouvriers ou les chômeurs se plaignent de ne pas avoir beaucoup d'argent mais ne savent pas le dépenser intelligemment. On leur reproche de dépenser leurs revenus dans des biens de consommation comme des télévisions, des téléphones portables, des cigarettes, de la malbouffe et maintenant des abonnements VOD.

En temps que transclasse, j'ai grandi dans un environnement plutôt défavorisé et j'ai moi-même occupé des emploi précaires pendant plus de 10 ans, dont 8 ans de nuit en tant que cariste-manutentionnaire dans un entrepôt. Je pense donc être assez qualifiée pour parler de cette réalité sociale.

Quand on gagne à peine de quoi vivre, les deux priorités principales sont d'avoir un toit sur sa tête et de manger à sa faim. Le reste est superflu. Si on a le choix entre des patates bio et des patates non bio, on choisira les patates les moins chères.

L'économie ainsi réalisée ne sert pas à s'offrir des abonnements et gadgets technologiques, mais à payer ses factures et boucler les fins de mois.

Quand on fait un travail extrêmement pénible physiquement, la fatigue ressentie à la fin d'une journée ou nuit de travail n'est pas comparable à celle ressentie quand on travaille dans un bureau climatisée. Actuellement, je passe au moins une demi-heure à une heure chaque soir à préparer le repas, avec plaisir. J'ai les moyens d'acheter des fruits et légumes locaux et de saison, ainsi que le temps et l'énergie nécessaires pour les cuisiner. J'ai également les moyens d'avoir un lave-vaisselle. Quand je travaillais à l'entrepôt, j'étais tellement exténuée en rentrant du travail que parfois, je peinais à rester debout. Je prenais mon repas principal à la cantine de l'entreprise et chez moi, je me contentais souvent d'un morceau de pain avec du fromage et des olives. Je comprends que cela soit encore plus difficile pour les familles avec des enfants, et que la volonté de leur offrir un repas chaud peut les conduire certains jours de la semaine à se tourner vers des plats préparés à réchauffer. Ils savent que ce n'est pas idéal, ils savent que ce n'est pas particulièrement économique et ils savent que ce n'est pas ce qu'il y a de meilleur pour la santé.

Quand on exerce un travail physiquement pénible, répétitif et à la chaîne, on a aussi besoin de se divertir et de s'évader un peu pour ne pas devenir fou. Pour ma part, j'ai choisi d'étudier par correspondance à temps partiel après le travail, ce qui m'a d'ailleurs permis de progresser socialement. Cependant, je ne blâmerai jamais ceux qui ne font pas ce choix en raison de la fatigue, du manque de confiance en soi ou parce qu'ils préfèrent se concentrer sur leur famille. Je ne connais pas le prix d'un téléviseur ou d'un abonnement Netflix, mais je ne serais pas surprise si, à long terme, cet investissement s'avérait plus rentable pour divertir quotidiennement une famille qui n'a pas forcément les moyens de sortir régulièrement au cinéma, au théâtre, de voir des concerts, de visiter des musées et des châteaux... Et honnêtement, s'ils doivent acheter des fruits et légumes non bio pour rendre leur vie un peu plus agréable, je ne les blâmerai pas non plus et je n'aurai certainement aucune leçon de moral et d'économie à leur faire.